Passer du bureau à la paillasse…  dessiner des tests  pour la suite du programme.

Comment passer de l’enquête aux tests ? Entre les sessions de mai et de juin 2024, nous avons « décanté » les enseignements glanés depuis le début du programme sur nos 8 changements de paradigmes, pour en tirer des intuitions, poser des hypothèses, dessiner des pistes de nouveaux leviers… à confronter au réel de chacun des territoires et des administrations partenaires, et à l’expertise des agent.e.s n charge développement économique complices de l’expérience…

 

La recherche-action, une prise de risque calculée

L’enquête a notamment permis d’identifier des difficultés, des angles morts, des impensés des métiers et des politiques de développement économique locales. Par exemple : des modèles ‘alternatifs’ qui se diffusent mais ne suffisent pas à transformer ces politiques faute de mettre en discussion les théories qui les sous-tendent ; une évaluation trop centrée sur les dispositifs et pas assez sur les effets et les finalités ; une vision souvent focalisée sur une économie définie par le haut, rare, internationale, qualifiée, qui peine à penser celle-ci sur une base élargie prenant en compte les pans d’une économie plus résidentielle, ordinaire, etc. ; le besoin de repenser l’accompagnement des TPE/PME, à la fois souvent moins bien outillées pour faire face aux enjeux de transition, et fréquemment éloignées des radars des collectivités, etc.

Nous nous sommes appuyés sur ces ‘problèmes’ pour poser de nouvelles hypothèses. Il s’agit d’un travail de créativité, puisque nous avons formulé des intuitions, nourries d’un travail de veille et de design ; c’est aussi l’étape incontournable d’une démarche scientifique : chacune est un partis pris, une proposition réfutable, qui doit être vérifiée et consolidée, et pour cela être testable et mesurable. Nous les avons formulé en une série de « ET si… » : Et si on aidait les élu.e.s convaincu.e.s de la nécessité d’un changement de paradigme à avoir plus d’impact (sur leurs pair.e.s, sur les acteurs économiques du territoire, etc.) ? Et si on s’appuyait sur les acteurs intermédiaires (grosses entreprises, réseaux,  assureurs, etc.) pour mobiliser les TPE/PME et avoir plus d’impact  ? Et si on adaptait les services de développement économique pour faire de l’économie ordinaire une priorité ?…

Un test, comme une pièce à casser

Comment tester la solidité de ces hypothèses avec chacun des territoires embarqués dans Rebonds, dans une fenêtre de 6 à 8 mois et une économie de moyens ? Nous avons resserré chacune de ces propositions en idées suffisamment précises et concrètes pour offrir la possibilité d’un premier jalon d’apprentissages, l’opportunité d’en « apprendre le plus en se mouillant le moins tout en engageant la suite si c’est prometteur ».

Par exemple, pour tester l’hypothèse de cadres de coopération plus souples et agiles afin de contribuer à des relations inter-territoriales fondées sur la réciprocité, on pourrait expérimenter un premier arpentage croisé, entre élu.e.s pour identifier les interdépendances et les enjeux communs de leurs territoires ; ceci permettrait de vérifier le degré de compatibilité des visions de chacun.e, et l’hypothèse de complémentarités ainsi que la bonne échelle pour les penser. Autre exemple, pour tester l’hypothèse d’une ZAE gérée comme un commun formulée dans l’idée d’amorcer une gestion plus collective et écosystémique du foncier, on pourrait tester la rédaction d’une charte de gestion commune entre quelques entreprises d’une ZAE ; ceci qui permettrait d’identifier de premier ‘communs’, mais aussi les leviers de mobilisation des entreprises et de coopération avec l’acteur public ; etc.

Pour retrouver l’ensemble de nos hypothèses, des inspirations qui les ont nourries, des propositions de tests, c’est par ici. Il s’agit d’une étape de travail ! Ces idées demandent maintenant à être adoptées, modelées, implantées dans le contexte de chaque collectivités, qui pour chacun en portera une ou deux. A suivre donc, mais en attendant n’hésitez pas à vous en inspirer !

Aide-mémoire pour construire des tests sans se perdre en chemin

Comme nous avançons dans la phase d’expérimentation avec chacune des collectivités, que notre ambition collective est (modestement) grande, et que nous savons que le changement se construit souvent mieux tranquillement et par itération, un petit aide mémoire nous semble utile pour rappeler quelques questions et réflexions à garder en tête.

Expérimenter, c’est adopter une posture de chercheur … On conçoit une expérimentation en reproduisant en laboratoire un phénomène, pour tester une hypothèse en faisant varier différents paramètres. Il s’agit par ce dispositif de valider (avec des utilisateurs) l’idée de départ pour continuer le développement du projet. Pour concevoir le test, il est donc important de préciser ce que l’on cherche à vérifier de l’idée de départ, les effets que l’on souhaiterait produire, les enseignements que l’on aimerait glaner.

Quelle degré de transformation cherchons-nous ? Clarifier collectivement l’ambition du test permet de mesurer les attentes : Cherchons nous à transformer radicalement le système et proposer une alternative ou à améliorer l’existant sans changer la vision sous jacente ? Si la première proposition semble plus désirable mais difficile à atteindre, quels curseurs pousser pour y arriver ?

Un test, ce n’est pas un projet ou même un pilote ! On bricole quelque chose d’essayable pour voir si l’idée marche, on fait des essais pour cerner progressivement ce qui pourrait marcher… Mais il ne s’agit pas de le pérenniser en l’état par la suite. Il faut donc penser une zone protégée (une exposition raisonnable par exemple), partager la posture expérimentale avec les collègues et partenaires, annoncer à l’avance le test comme éphémère, pour encourager la légèreté et la prise de risque

Une expérimentation ce n’est pas réussi ou raté …c’est ce que l’on va apprendre qui va nous permettre de mettre en place une innovation. Il est utile de se préparer à évaluer et à documenter le test, pour collecter également les effets collatéraux, non prévus (a-t-on fait apparaitre un usage imprévu ? créé de nouveaux problèmes..?)

Penser l’économie du test, c’est important. Que peut on essayer de faisable/raisonnable, qui soit le plus léger/économique/rapide et en même temps qui nous en apprenne le plus sur ce que l’on veut expérimenter ?

Retour en haut